Ma maison est pas mal à terre, ces temps-ci. J'essaye de ramasser les quelques matériaux qui pourront m'être utiles dans la construction de ma prochaine demeure. J'ai regardé mon chez-moi partir en fumée. J'en suis sortie in extremis, quelques brûlures et blessures qui cicatriseront sur les bras et le coeur, et quelques babioles sauvées dans le creux de mes bras. J'ai regardé mon chez-moi s'éteindre et s'effondrer pour ne former qu'un lourd amas de cendres noires et de fumée qui pique les yeux. La gorge serrée, les yeux humides et la machoire crispée, je me suis tournée et je suis partie. Ça sert à rien de regarder sa vie s'écrouler devant soi à part se péter le cœur en mille. J'vous mentirai pas, j'ai été tentée de retourner sur les lieux de l'incendie à maintes reprises. Parfois, j'suis allée jeter un petit coup d'œil, juste passer devant, voir ça ressemble à quoi maintenant. Eh bin, ça ressemble à rien. C'est qu'une masse noire et informe, vide de vie et de sens. J'ai dit adieu à tout ce que j'avais vécu dans cette maison. Tous ces rires, ces pleurs, ces joies, ces colères, ces danses, ces discussions. Avec les jours, j'ai fini par revenir moins souvent, j'avais moins besoin de revoir le terrain. Et, j'avais un plan, quelques rues plus loin. Je construisais pour moi-même. Je rebâtissais proche, mais pas exactement au même endroit. J'ai imaginé seule toutes les chambres, tous les meubles, tous les cadres et les photos insérées dans ceux-ci. J'aime bien cette nouvelle construction. Oui, oui. C'est beau, ça devient tranquillement chez-moi. J'aime toutes les pièces, surtout celle où je garde les souvenirs. Ça me fait rire, parfois ça me fait pleurer. J'ai des photos de mon ancienne maison. J'aime encore l'observer, l'admirer. Mais parfois, il fait froid dans ma maison. Il fait froid et il pleut. Parce que j'ai pensé à tout. J'ai pensé à toutes les pièces, à tous les détails. Mais dans ma nouvelle maison, j'ai oublié qu'un seul minuscule petit détail qui change tout. J'ai plus de protection, de bouclier. Dans ma maison, il n'y a plus de toi. Et parfois, j'ai froid sans toi.
4 Commentaires
Denisr
4/1/2016 06:38:58 pm
C'est toi qui a écrit ça Marjorie?
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Marjorie
4/2/2016 10:19:07 am
oui, c'est moi qui ai écrit tous les textes ici :)
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Quelle belle plume ! En si peu de mots, être capable de décrire tant de sentiments, c'est un talent à développer.
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Linda Aubé
4/3/2016 06:11:49 am
Marjorie, mon sourire favori :) J'me suis vu dans ce poème. J'ai marché dedans, en voyant mon histoire à moi ! Avec ma Loulou !!
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Marjorie BérubéJ'écris pour calmer les tempêtes dans ma tête et pour faire le ménage dans les mots qui s'y entrechoquent. Archives
Décembre 2019
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