ton regard vide, absent, lointain me fixe. tu me vois, dis? qui vois-tu exactement? je crois que les souvenirs gravés dans ma mémoire jeune n'y sont plus dans ta banque de données faiblissante. je me demande si tu souris à l'adolescente souriante devant toi, ou si tu vois la petite fille aux doigts mordillés et aux lunettes rondes. je crois que tu vois probablement rien. tu ne fais que répondre à mes expressions délicates mais inconfortables. mon regard se trouble, à la dérive. te rappelles-tu? non, je sais. mais moi oui. je me rappelle ta maison, tes carrés au citron, tes mots croisés, tes cahiers à colorier. je me rappelle ta voix déjà chevrotante, tes yeux bleu mer des caraïbes. je me rappelle t'entendre dire que tu m'emporterais dans ta valise. je me rappelle dormir sur le plancher de ton salon. toutes ces choses sont si vives, si vraies pour moi. et pourtant, elles ont perdu forme dans ton esprit, se sont évaporées au rythme des saisons. et puis dans le bleu de tes yeux éteints, et au travers des vagues dans les miens, je vois d'autres. je la vois, elle, qui deviendra peut-être toi. je me vois moi, malgré la teinte visiblement plus sombre de mes yeux. je reconnais en moi des signes de toi. que puis-je te souhaiter? pourquoi vois-je encore le bleu de tes yeux? pourquoi tes paupières lourdes ne se scellent-elles pas à tout jamais? qu'as-tu encore à m'apprendre, dans ton ignorance et ton errance? peut-être me reste-il qu'à plonger dans la mer de tes yeux pour y voir ta vie passée. peut-être dois-je me perdre dans l'océan de tes pensées abstraites, oublieuses. peut-être qu'avec ce que tu perds, je me retrouverai.
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Marjorie BérubéJ'écris pour calmer les tempêtes dans ma tête et pour faire le ménage dans les mots qui s'y entrechoquent. Archives
Décembre 2019
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